The World Restaurant Awards 2019
Y a-t-il trop de remises de prix et trop de listes pour récompenser les chefs et les tables du monde ? Paradoxalement, c’est un des derniers nés, the World Restaurant Awards (et probablement l’un des plus intéressants) qui le révèle de la manière la plus brutale. En effet, entre le centenaire Michelin, incontournable en France mais dispensable dans la majorité du monde civilisé, les World’s 50 Best, cosmopolites et parfois soupçonnés de francophobie, et le reste de la galaxie des guides plus ou moins gastronomiques, il faudra bientôt créer un guide pour s’y retrouver.
Et moi, et moi, et moi
Trop souvent oublie-t-on à quel point la gastronomie devrait être toute entière dédiée au plaisir de ses consommateurs plutôt qu’à l’égo de ses acteurs. C’est là que the WRA, propulsé par IMG, appuie là où ça fait mal en nous faisant du bien. Loin de l’entre-soi compulsif franco-français, il soufflait au soir de la première cérémonie au Palais Brongniart la brise fraîche de la bonne humeur, soufflée par la valse de centaines de participants venus des quatre coins du monde, heureux d’être à Paris (même ça, c’est frais).
Or grâce à cette ouverture au monde, il y eut aussi bien de la découverte que des séquences improbables et inédites. Quelle joie que de découvrir et converser avec Darina Allen et JR Ryall du Ballymaloe House, cette maison d’hôtes irlandaise, totalement hors des sentiers battus. La même que celle de noter de nouvelles destinations rendues attractives par une simple mention sur la scène. Quel gourmand plaisir que de déguster le buffet du chef singapourien Justin Queck, pendant qu’Alain Passard se voit remettre le prix… du meilleur Instagram et qu’Alain Ducasse récupère le prix du Meilleur Chef Sans Tatouage ! Ajoutez à cela une animation digne des Césars du bondissant Antoine de Caunes et une bande-son aux petits oignons, et vous obtenez : enfin une soirée réussie où les nombrils se font moins nombreux que les sourires.
Et les autres
Dernier point : il est également à noter que furent enfin récompensées des initiatives fantastiques telles que le Refugee Food Festival et il Refettorio de Massimo Bottura où sont remis au centre de la table l’humanisme et le sens du partage. L’auteur de ces lignes ignore s’il y a un véritable avenir à cette énième soirée de récompenses initiée par Joe Warwick et le fantasque journaliste Andrea Petrini, par ailleurs co-fondateur des World’s 50 Best. Toujours est-il que cette petite parenthèse en grandes pompes fut aussi bienvenue que la ligne de téléphone lorsqu’elle arriva à la maison de campagne.